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Topaz Henson

1984

Naître dans une famille heureuse, aimante, et plutôt saine, c'est le rêve de pleins de gens de mon âge j'imagine. Ils se demandent comment leur parents peuvent être si peu ouverts aux changements perpétuels de la société actuelle, si rétrogrades même, au point de se demander comment ils ont pu naître dans une telle famille. Mais être entouré d'une famille trop heureuse, trop aimante, et trop saine, c'est loin d'être un plaisir pour tout le monde. En tout cas ce n'est pas vraiment le mien.

Je suis née le 12 août 1966, ce qui fait donc de moi un lion si j'en crois l'astrologie ; En fait, je ne sais même pas vraiment si j'y crois. Mais si c'était si facile, je suppose que j'aurais une excuse pour faire comme si j'avais confiance en moi. Je suis donc née d'une mère au foyer artiste dans l'âme, et d'un père dirigeant d'un disquaire en plein milieu de Boston, avec un grand frère de 4 ans mon aîné. Mon enfance s'est passée entourée de 45 tours tournant en boucle, de voix magiques et de rêves de grandeur. Entre les journées passé à fouiller dans le magasin de mon père et les visites d'expositions d'art avec ma mère, je baignais dans un univers décomplexé. Encouragée à développer ma "fibre artistique" le plus tôt possible, je chantais beaucoup. Beaucoup trop. Après une année de cours de chant, j'avais même décider d'en faire mon métier. Alors à 12 ans, tout le monde voyait déjà en moi une grande diva, en tout cas dans l'entourage de mes parents. J'aurais peut-être dû me contenter de ça. Non, vraiment, j'aurais dû me contenter de ça. Mais est-ce par esprit de contradiction, par pur hasard ou tout simplement par malchance que je me suis retrouvée là ? À force de m'auto-persuader que je voulais vraiment devenir célèbre, j'en finissais par en être dégoûtée au plus haut point.

Bien que j'en parlais rarement à mes proches, la Middle School était un univers assez effrayant pour moi. Le ravin entre la bienveillance qui m'entourait chez moi, et la supériorité que je subissais en dehors me paraissait bien difficile à supporter. Alors je naviguais difficilement entre ces deux univers contraires. L'affreux dilemme était surtout dans le fait que je savais pertinemment que je pouvais parler de ma situation désastreuse à mes proches, mais que ça rendrait tout bien plus difficile. Entre un grand frère qui aurait tué la moindre personne osant me critiquer et mes parents qui auraient tenté par tout les moyens de faire punir les coupables de ma mise à l'écart... Oh, ça aurait été bien pire. Et puis je savais qu'il y avait pire que moi, alors je n'avais pas vraiment à me plaindre. J'étais plus invisible que visée par les attaques.

Mes années Middle School se passèrent finalement sans aucun incident affreusement notable, et mon entrée en Freshman Year se produisit sans encombres. Enfin, je connaissais ce sentiment de joie qu'était l'amitié ! Sans m'en rendre compte, je passais certainement les meilleures années de ma vie, entourée, jamais seule. Jusqu'au mois de février 1985. Je ne m'y connais pour le moins pas du tout en économie, en gestion et tout ces soucis, mais je sais que le disquaire de mon père a fait faillite. Le succès n'était déjà plus au rendez-vous depuis quelques années, mais l'invention du CD enterra son affaire. En quelques mois, notre situation est passée de "confortable" à "faire attention au moindre centime". Je n'étais pas capricieuse, jamais, à ce que je sache du moins, mais ça change un peu la façon de voir la vie. Pour autant, notre situation n'était pas non plus catastrophique, et mes parents voulaient profiter de cette occasion pour changer totalement d'univers, et s'installer loin de la ville, dans le Maine. Quelques mois suffirent pour rendre les clés de notre appartement du centre-ville, et préparer tout les papiers nécessaires à notre arrivée. Retour à la case départ. Partir de cette ville que je connaissais par coeur, et attachée à des milliers de souvenirs fut le plus difficile, plus encore que le fait de quitter mes amis.

Dès mon entrée dans cette ville, j'ai ressenti toute la lourdeur de l'atmosphère s'appuyant en ce point précis qu'était Aster Cove. Comme un aimant, je me sentais à la fois attirée et repoussée par cet endroit, une sensation plus qu'effrayante. Il y avait définitivement quelque chose de différent ici, et je ne savais pas vraiment si je voulais savoir quoi. Pourquoi avoir choisi cet endroit plutôt que n'importe quel autre ? Mes parents m'ont tout simplement rappelé qu'ils avaient racheté un vieux magasin ici. Je n'en saurais pas plus pour l'instant, mais je ne compte pas abandonner. C'est comme si cet endroit révélait en moi un instinct d'enquêtrice. Peut-être pas tant, mais cet environnement soulevait de fortes interrogations en moi. Et puis après tout, j'allais bien devoir m'occuper pour rendre ma nouvelle vie ici moins ennuyeuse...

• Essaie d'être le plus invisible possible la plupart du temps • Calme • Toujours trop curieuse • Anxieuse • Étourdie et toujours dans les nuages • 

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